[…]Une “image” est plus que le produit d’une perception. Elle apparaît comme le résultat d’une symbolisation personnelle ou collective. Tout ce qui se passe sous nos yeux, qu’il s’agisse de la vision physique ou du regard intérieur, se laisse donc élucider et transformer en image.
Aussi la notion d’image, si on veut bien la prendre au sérieux, ne saurait-elle être en définitive qu’une notion anthropologique. Nous vivons avec des images et nous comprenons le monde en images. Ce rapport vivant à l’image se poursuit en quelque sorte dans la production extérieure et concrète d’images qui s’effectue dans l’espace social et qui agit, à l’égard des représentations mentales, à la fois comme question et réponse, pour employer une formulation toute provisoire. » […]
BELTING Hans, 2004, Pour une anthropologie des images, Paris, Gallimard, 2004, p. 18.
« L’homme est naturellement le lieu des images. Naturellement, parce qu’il est un lieu naturel des images, une sorte d’organe vivant pour les images. En dépit de tous les dispositifs et agencements au moyen desquels nous émettons et stockons aujourd’hui des images, en dépit, également, de leur prétention à établir et à exercer des normes, il n’y a que l’homme qui soit le lieu où des images sont perçues et interprétées dans un sens vivant (donc éphémère,
difficilement contrôlable, etc.) »
BELTING Hans, 2004, Pour une anthropologie des images, Paris, Gallimard, 2004, p. 77
La figure* prend la place du corps dans l’image, comme une ombre, une marionnette, un performer, et s’interroge sur la reconstruction de ses limites, pénètre dans l’image comme un techno-corps, comme un meta-corps ou un non-corps.
Si l’on envisage le corps comme un fragment, un extrait dans la réalité, un espace qui à chaque fois a des symbolismes différents et cherche les limites nécessaires à la construction de son image, le corps peut se définir comme une hétérotopie. Le séméion (signe) et le logos (parole, discours) deviennent le seuil de la mémoire, de la recherche, de l’expression et de la communication.
*Par figure, nous entendons la forme utilisée dans mon propre travail artistique. De manière allégorique, elle renvoie à son rapport au Moi et l’Autre.
Λάμψη, δέσμη λάμψεων, κι ύστερα τίποτα για να δεις.
Tα ανθοκέρασα είναι ακόμα κρεμασμένα στην ανθισμένη κερασιά.
Θανατηφόρα βροχή, ανθρώπινη δύναμη, θα το ξανακάνουν.
Πέρασαν πολλά χρόνια.
Bάζουμε τις μάσκες μας και ξαναγυρνάμε στην πόλη.
Διασχίζω τους δρόμους, σιλουέτες παντού.
Φιγούρα, υλική υπόσταση που αλλάζει.
Eκπαιδευμένοι πια, κινούμαστε στο χώρο.
Tο μόνο που συναντάμε καθημερινά είναι οι φιγούρες μας,
σκιές στους τοίχους και τους δρόμους αυτής της πόλης.
Tις κόβω τις φιγούρες και τις μαζεύω στο συρτάρι μου.
Aνθρώπινες φιγούρες που τις κάνω εικόνες.
Eικόνες-αποσπάσματα από θεατρική παράσταση.
Φιγούρες σε ατέλειωτες διαδρομές που ψάχνουν διεξόδους.
H κερασιά είναι ανθισμένη εκεί έξω.
Bράδιασε, το κορίτσι έκλαψε, έκλαψε πολύ, έτσι για να ησυχάσει.
Tυλίχτηκε με το λεπτό χάρτινο μαντήλι της και δεν ξαναμίλησε.


Η φωτογραφια λοιπον, σαν μέσο καταγραφής και συλλογής πληροφ-οριων(αποκομμα), στη λογική μιας συνεχούς αφαιρεσης σε ενα αυτο-βιογραφικο ταξιδι.
Φιγούρες – ομοιωματα που συνηγορούν στις εγκαταστασεις , σχολιαζοντας την επαναληψη, το πολλαπλο , το ομοιωμα, σαν μια κατασκευη που παρουσιαζει τη φύση και το χώρο του, δηλαδη τη φιγουρα σαν προιον επεξεργασιας , σαν στερεοτυπο, σαν κωδικας.
Επαναλαμβανομενες εικόνες σε παραγωγες video, αφηνουν κι αυτες το δικό τους (ψηφιακο) ίχνος , σε χρόνους μεταφορικους και αλληγο-ρικους. Έτσι, σε μια προβληματικη “πλαστικοτητας του χώρου” και ενός “βιωματικου χρόνου”, συνανταμε τη δυναμικη της φορμας του αποκομματος, σ εναν μη-χωρο, σε μια non finito.. εικαστικη ου-τοπια.
« Il faut que je lui fasse une statue, dit l’Oiseau du Bénin.
Car je ne suis pas seulement peintre,mais aussi sculpteur.
– C’est ça, dit Tristouse, il faut lui élever une statue.[…]
-Une statue en quoi ? demanda Tristouse. En marbre ? En bronze ?
-Non, c’est trop vieux, répondit l’oiseau du Bénin, il faut que je lui sculpte une profonde statue en rien, comme la poésie et comme la gloire.
-Bravo ! bravo ! dit Tristouse en battant des mains, une statue en rien, en vide, c’est magnifique, et quand la sculpterez-vous ? »
Guillaume Apollinaire, Le Poète assassiné, Paris, l’Edition, 1916.
Photographs become “tableau photographs”, photo-metaphors; they use their information like a form of writing, like shadows of ideas. In this context, the viewer encounters photographic works and collages created, sculptures created by layers of paper; in this manner realism, abstraction and randomness intertwine in a dialogue between art and life in either a poetic, a psychoanalytic or a narrative manner.
As part of this space plasticity problematic, we will try to comment on the extract dynamics as a unique space in a figurative u-topia.
There is no doubt that the presence of the body is plethoric and may also mean a certain crisis of it. Nevertheless, presence and absence – as both exist – have their own dynamics and follow their own way. As a result, the body’s presence was analyzed in the symbolic space, where the significant body meets art, ideology and society. According to Paul Ricoeur (Paul Ricoeur, Sur la traduction, Paris, Bayard, 2006), the meaning is always determined by use and influenced by the context.
A parallel between the role of the artist who uses his own body in his work and the autobiographic journey. We can say, quite simply, that the image becomes a drawing and at the same time the drawing becomes an image. These interchanges, which explore the limits of the image and its presence, have become an intrinsic part of the artist’s journey this past thirty years – an autobiographic search.
Questions about the body, its image and myth in relation to space, to the search of the way it lives in the plastic space ; through the dynamics of the extract, of the fragment of the photographic image, as an autonomous revelation or dissimulation in this space of the image and of the environment.
The body in passages from the self to the other, through the scene and its presence, through civilization and its culture, through the action, space and time. The figure takes the place of the body in the image, like a shadow, a puppet, a performer, wondering about its limits reconstruction, entering in the image like a meta-body or a non-body.
If we think of the body as a fragment, an extract into reality, a space which has every time different symbolisms and searches the limits necessary so as to construct its image, the body can be defined as a “heterotopy”. If we study the body through a hermeneutics of “the body as a unique space” in its social representation, is it a space with or without limits?
And if the body in the everyday practice and in the artistic action, including the moral and aesthetic values, is pain and desire, is it at the same time the “space” of the “oneself”.
Ainsi le temps s’écoule. Des images… j’en rencontre tous les jours ; des formes, comme des impressions sur les murs, comme des traces sur un marbre depuis longtemps oublié, comme le linge qu’on laisse sécher au soleil ; alliés dans un long voyage, un jeu auquel je joue aussi, comme une figure bien élevée.

C. Castoriadis, Fenêtre sur le Chaos, Paris, Seuil, 2007

(Αριστοτέλης, Ποιητική, 1448 b 4-9).

[…] It can be seen that poetry was broadly engendered by a pair of causes, both natural. For it is an instinct of human beings, from childhood, to engage in mimesis (indeed, this distinguishes them from other animals: man is the most mimetic of all, and it is through mimesis that he develops his earliest understanding); and equally natural that everyone enjoys mimetic objects.[…]
(Aristotle, Poetics, IV. Translation, Loeb Classical Library)
[…] Poetry in general seems to have sprung from two causes, each of them lying deep in our nature. First, the instinct of imitation is implanted in man from childhood, one difference between him and other animals being that he is the most imitative of living creatures, and through imitation learns his earliest lessons; and no less universal is the pleasure felt in things imitated.[…]
(Aristotle, Poetics, IV. A translation by S. H. BUTCHER)

Ces dernières années, le champ de mes expérimentations (comme photographe) a consisté en la transposition de l’image latente de la pellicule sur le papier – comme un espace autonome –, en l’intervention sur ce dernier et, enfin, en la mise en dialogue de l’ensemble de ce matériel avec d’autres moyens dans une installation.
Comment une situation ou une approche imaginaire se met-elle en acte et s’exprime-t-elle dans une intervention figurative ?
Des figures en papier, sorties de leur contexte, photographiées, placées dans d’autres contextes, photographiées à nouveau ; des figures voyageuses dans des paysages réels ou imaginaires, et capables de nous faire voyager avec elles. C’est ainsi que nous les retrouvons devant nous, nous les rencontrons dans notre quotidien, dans nos itinéraires journaliers, sous forme d’estampes, comme des traces sur les murs, comme des reliefs sur des marbres oubliés, comme le linge étendu à la terrasse, comme des voyageurs dans un long voyage, comme des acteurs dans une représentation à laquelle nous participons nous aussi comme figure, un lieu ou un non-lieu.
Des figures-traces, qui fonctionnent comme forces motrices d’un récit, d’une rêverie. Des figures qui se transforment en photos et qui, laissant leurs traces sur la ville, sont photographiées à nouveau ou sont transformées en photocopies, suspendues en tant que transparences ou projetées sur des surfaces diverses, et soit reviennent à leur matière initial, la pâte à papier, soit voyagent pour revenir sous forme de copies, soit renvoient l’une à l’autre en créant la relation «je deviens le lieu où je me trouve».

Paul Ricoeur, Sur la traduction, Paris, Bayard, 2006, p. 47

“Être dans un sujet” : vécu dans un espace unique ; ce qui est dans un sujet est matière, usage, geste dans cet espace de choses où il ne s’agit jamais d’une chose, mais toujours seulement d’une « espèce de chose ». Le corps-modèle devient l’œuvre et son « lieu », mais aussi sa limite, offrant à la fois son absence et son identité.
Une mise en scène, une structure, une construction qui fait qu’un corps-tortue porte toujours sa carapace dans ses déplacements entre le réel et le symbolique, afin que sa « tragédie » atteigne quelque sommet imprévu. Pour un montage figuratif, la réponse est peut-être simple : l’écran est un bon conducteur d’images de vie que nous considérons comme données, chargées d’un sens ordinaire – des hommes et des choses.
Face à des formes moins reconnaissables, la réponse est plus personnelle, plus intime ; comme si c’était nous qui projetions le fond de notre âme sur l’œuvre et non pas l’œuvre qui projetait son âme sur notre regard.

Afin de donner une signification à l’espace, la Renaissance a imaginé l’utilisation de la boîte, devenue plus tard l’espace scénique. Aujourd’hui, nous vivons dans un monde post-Renaissance, dans le sens où nous étouffons au creux d’un système de boîtes emboîtées, ville, maison, chambre, et enfin téléviseur et ordinateur à travers lesquels la ville-écran projette ses désirs dans notre espace.
Ainsi, le corps serait en quête d’images, non pas parce qu’il en a besoin, non pas parce qu’elles lui sont utiles, mais bien parce qu’elles lui sont inutiles, c’est-à-dire jolies. Laissons dialoguer le corps avec le mythe et son image ; laissons les instants circuler en se chassant l’un l’autre – pour reprendre les propos d’Hegel sur le temps ; laissons aussi les machines trouver leur propre mythe ; c’est peut-être ainsi que le corps, cet espace unique, incarnera l’image d’une utopie utopique, à travers le caractère critique, imprévisible et libérateur de l’art.
